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Société des Missions Africaines –Province de Lyon
Le Père Joseph GARNIER

GARNIER Joseph né le 9 mars 1912 à Saint-Mesmin
dans le diocèse de Luçon, France
membre de la SMA le 30 juin 1934
prêtre le 4 juillet 1937
décédé le 22 novembre 1995

1937-1983 missionnaire en Côte-d'Ivoire
1937-1942, Abidjan
1942-1945 et 1948-1950, Adzopé
1945-1947, Agboville
1947-1948, Bingerville
1950-1960, Anyama
1960-1972, Attinguié
1973-1974, Dabou, hôtelier
1974-1977, Yakasse-Attobrou
1977-1983, Saint-Michel d’Adjamé
1984-1995 Montferrier, retiré

décédé à Montferrier, France, le 22 novembre 1995,
à l'âge de 83 ans


Le père Joseph GARNIER (1912 - 1995)

Joseph Garnier est né le 9 mars 1912 à Saint-Mesmin, à 14 km de Pouzauges, en Vendée, mais ses parents habitent au Puy-Menatier de Montravers, près de Cerizay, dans les Deux-Sèvres, et le diocèse de Poitiers. Son père est domestique dans une ferme. En 1923, Joseph entre à l’école cléricale de Châtillon-sur-Sèvre, puis au petit séminaire de Montmorillon.

C’est un enfant assez espiègle et chahuteur, mais sérieux. En classe de 5ème, il entend un appel à la vie missionnaire lors du passage d’un père sma, Etienne Vion, au cours d’un de ses congés. En 1929, Joseph entre au grand séminaire pour étudier la philosophie. Là, il se décide pour les Missions Africaines, mais rencontre l’opposition de son curé, de ses supérieurs, et de son évêque. Il fait donc sa première année de théologie à Poitiers, et ce n’est qu’en juin 1932 que son évêque lui permet de continuer sa théologie au grand séminaire du "150", à Lyon. Le 30 juin 1934, il prononce son serment missionnaire qui le fait membre de la SMA. Dans les années 1935-1936, il fait son service militaire. Puis, trop jeune pour être ordonné selon les normes du Droit Canon, il est envoyé comme professeur à Pont-Rousseau. Il sera ordonné prêtre le 4 juillet 1937.

Le père Joseph Garnier avait le désir d’aller au Dahomey, mais il écrit à son provincial qu’il est disponible pour se rendre là où Dieu le veut. C’est avec joie qu’il reçoit sa nomination pour la Côte-d’Ivoire. De 1937 à 1942, il exerce son ministère à Abidjan, avec un intérim à Abengourou en 1940. Il a en charge le pays akié, depuis l’Agneby, à la limite de Dabou, jusqu’à la Mè, à la limite de Memni et, au nord, jusqu’à la limite d’Agboville. Son pied-à-terre est à Abidjan. Il visite aussi les villages Ebrié d’Abobo, d’Anonkoua et, sur la route de Dabou, ceux de Yopougon-Akyé et d’Andokoué.

En 1942, le père Garnier est nommé à Adzopé avec le père Joseph Miet. En 1945, après 8 ans de séjour, il prend son premier congé. A son retour en Côte-d‘Ivoire, il rejoint le père Ernest Compagnon à Agboville.

En 1947, il est nommé supérieur du petit séminaire de Bingerville. Mais, un an plus tard, il retourne à Adzopé. En 1950, il est affecté à la paroisse d’Anyama, fondée en 1948, par le père Camille Chirol, et il va y rester 10 ans.
En septembre 1960, le père Garnier est nommé pour ouvrir la nouvelle paroisse d’Attinguié. Il y trouve les sœurs des Saints Cœurs de Jésus et de Marie, originaires de Paramé dans les Côtes-d’Armor, et qui viennent d’arriver. Il est heureux de pouvoir collaborer avec elles dans cette région rurale.

En 1973, ses supérieurs lui demandent de venir à la maison régionale de Dabou pour y remplir le rôle d’hôtelier. A son retour de congé en 1974, le cardinal Yago lui confie la fondation de la nouvelle paroisse de Yakassé-Attobrou, à 25 km à l’est d’Adzopé. Pendant une année entière, il loge à Adzopé dont le responsable est l’abbé Joseph Akichi, futur évêque de Grand-Bassam. Chaque semaine, il passe 2 ou 3 jours à Yakassé. Il peut achever l’église déjà construite par les gens, ainsi que son logement, pour s’y installer en 1975. Cette nouvelle paroisse compte 11 villages et de nombreux campements. C’est une région où les chrétiens sont peu nombreux. Ses nombreuses visites, et le travail sérieux des catéchistes, vont permettre à certains villages de s’ouvrir à l’Evangile. En août 1946, il peut baptiser quelques adultes et régulariser des mariages. Il paye une mobylette à son catéchiste principal, pour visiter les villages, aider les autres catéchistes et enseigner le catéchisme dans les écoles publiques.

En 1977, à son retour de congé, le père Garnier est affecté à la paroisse saint-Michel d’Adjamé. Il regrette beaucoup d’être arraché à la paroisse qu’il vient de fonder, pour venir dans la ville d’Abidjan. Il aimait les populations villageoises. Par ailleurs, il s’était lié d’amitié avec un pasteur protestant, malgré les différences qui les séparaient. Son rôle à Saint-Michel est d’accueillir les gens qui viennent exposer leurs problèmes et demander des conseils ; c’est aussi d’accueillir les malades sans argent qui veulent se soigner. Ainsi ses autres confrères sont libres pour s’occuper de la catéchèse des écoliers et collégiens, des réunions du soir des divers mouvements, des sessions de formation avec les groupes de laïcs.

De temps en temps, des personnes de ses anciennes paroisses viennent le visiter, ou l’invitent à des jubilés de mariage, ou des anniversaires de funérailles : c’est l’occasion pour lui de retrouver un pays connu. Parfois, la maison régionale de Dabou le demande pour assurer, pendant quelques semaines, le service d’accueil. En 1979, il a la joie d’assister à l’ordination du 1er prêtre de son ancienne paroisse d’Attinguié, l’abbé André Benoît Mobio.

Un des grands jours de sa vie fut la rencontre de Jean-Paul II, lors de sa visite en Côte d’Ivoire en 1980. Il rapporte l’événement dans une circulaire à ses amis : J’ai eu la joie de participer de très près aux dernières heures du pape à la léproserie d’Adzopé. Après avoir béni les lépreux et leur avoir serré la main, le pape salue quelques sœurs et prêtres présents. Monseigneur Yago me présente à lui : Saint-Père, voici le plus vieux missionnaire de mon diocèse. Le pape me prend les mains et je lui dis : Oui, très Saint-Père, j’étais ici tout au début de la léproserie en 1942, et je suis le seul survivant de cette époque. Le pape me demande : 1942 ! Depuis quand êtes-vous donc en Côte d’Ivoire ? Saint-Père, depuis 1937, cela va faire 43 ans ! Et alors, j’ai été très ému de voir les yeux du pape s’embuer, tandis qu’il répétait : Quarante trois ans ! Quarante trois ans ! et me donnait sa bénédiction. Retiré sur le podium, au fauteuil, il me regardait encore en hochant la tête, et me bénissait.

Dans une circulaire de la mi-décembre 1980, le père Garnier raconte les activités multiples et débordantes de la paroisse Saint-Michel, et les transformations religieuses opérées en Côte-d’Ivoire en 90 ans d’évangélisation.

En mai 1983, il rentre en congé et se fait opérer de la cataracte aux deux yeux. Ses supérieurs veulent le retenir en France. Mais il pense que sa bonne santé lui permet de continuer à travailler en Afrique. Il accepte de quitter Adjamé et de devenir aumônier de la léproserie d’Adzopé.
Il revient en Côte-d’Ivoire, le 23 janvier 1984. Il quitte Lyon avec une température de –1° et débarque à Abidjan, le jour même, avec une température de 30°. Il est terrassé par cette forte chaleur. Il se couche pour se reposer mais, trois heures plus tard, il est frappé par une hémiplégie : il ne peut ni appeler, ni bouger, le côté droit et la jambe droite étant paralysés. Après quelques jours au CHU de Cocody, il est rapatrié à Lyon et conduit à l’hôpital neurologique, avant de prendre le chemin de la maison de retraite de Montferrier-sur-Lez.

Le père Garnier laisse le souvenir d’un confrère très fraternel, parfois un peu bourru, mais d’une grande sensibilité. Il aimait raconter ses souvenirs avec beaucoup d’humour. Jusqu’à la fin de sa vie, à demi paralysé, il essaiera de continuer à correspondre avec ses amis et ses confrères à l’aide de sa vieille machine à écrire datant de 1942.

Le 4 juillet 1987, il célèbre son jubilé d’or sacerdotal au milieu de ses confrères de Montferrier. Un peu plus tard, il se réjouit de voir se réaliser le projet africain sma et d’apprendre la bénédiction du foyer d’Ebimpé, le 9 décembre 1991, par le cardinal Bernard Yago, archevêque d’Abidjan.

Sa santé lui cause de plus en plus de soucis. En 1994, il renonce à aller passer son congé au pays natal. Le 20 novembre 1995, il écrit quelques lignes à un confrère et note : Depuis 15 jours, je baisse rapidissimo ! Le mardi 21 novembre, il écrit à un vieil ami de séminaire, Arsène Rossard, prêtre du diocèse de Poitiers. Il lui dit : Comme tout le monde, je ne connais ni le jour ni l’heure. Mais, en recevant cette lettre, tu sauras que je suis un peu plus avancé sur la route qui conduit à la maison du Père, et, peut-être même, suis-je déjà rendu au terme ! Seul le Seigneur, dans sa miséricorde, peut ainsi le vouloir. Dans la nuit même de ce 21 novembre 1995, le père Garnier nous quittait, à l’âge de 83 ans.