Société des Missions Africaines – Province de Lyon
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né le 12 novembre 1920 à Bréhand-Moncontour dans le diocèse de Saint-Brieuc (France) membre de la SMA le 10 août 1942 prêtre le 24 février 1947 décédé le 11 janvier 2008 |
1947-1948 Thorenc, soins décédé à Montferrier (France), le 11 janvier 2008, |
Le père Roger ERHEL (1920 - 2008)
Roger Erhel est né le 20 novembre 1920 à Bréhand-Moncontour, petite localité des Côtes-du-Nord où son papa tient la boulangerie. Il a deux sœurs et un frère. Elevé par son papa, car sa maman était décédée alors qu'il avait six ans, il dit lui-même que son enfance n'a pas été douce. Par deux fois, il fugue, quitte la maison paternelle et se réfugie chez l'une de ses tantes. Un moment, on le croit mort. Il est bien baptisé à la naissance, mais plus tard son père l'envoie à l'école laïque, car ses idées de gauche ne lui rendaient pas sympathique tout ce qui touchait à l'Eglise. Il raconte même que les prêtres, les sœurs et les frères de Bréhand préféraient aller acheter leur pain dans un autre village, à 5 ou 6 km, plutôt que de se faire servir par M. Erhel.
Après son certificat d'étude, vers l'âge de 12 ans, il est envoyé à Rennes comme apprenti garçon de café : vie très dure, où il ne reste qu'un an. A 15 ans, il est placé, comme garçon à tout faire, dans une communauté de religieuses à Saint-Quay, station balnéaire bien connue de Bretagne. Là, il découvre la J.O.C. et participe activement à Paris, en 1937, au congrès organisé à l'occasion de son 10e anniversaire. Il écrira plus tard : Ce fut formidable. […] La J.O.C. et le Congrès de Paris furent peut-être le déclic qui me fit désirer de passer ma vie à annoncer Jésus-Christ. Quand j'écrivis cette bonne nouvelle à mon père, il me répondit que j'étais la honte de la famille et que, désormais, je ne devais plus mettre les pieds dans sa maison. […] Je fus 7 ans sans revoir mon père.
Il rencontre le père Galliou qui l'oriente vers les Missions Africaines. Dès 1937, il entre à Martigné-Ferchaud où il passe trois ans comme vocation tardive, puis deux autres années pour les études de philosophie et le noviciat. Pendant les grandes vacances, il doit se louer comme garçon de ferme, afin d'avoir l'argent de poche pour ses menus frais de l'année. Après son premier serment, il va à Lyon pour étudier la théologie. Mais la vie y est difficile pendant les années de guerre : la nourriture est insuffisante, le chauffage également. Plusieurs séminaristes attrapent la tuberculose pulmonaire. Il est ordonné prêtre au milieu de sa quatrième année de théologie, alors qu’il est très sérieusement malade. Avec d’autres confrères sma, il part se soigner au sanatorium du clergé à Thorenc. Après son ordination, il devra attendre quatre ans avant d'avoir le feu vert du docteur pour un départ en Afrique, avec recommandation d'une nomination pour une mission loin de l'océan.
En 1951, il est mis à la disposition de Mgr Faroud, pour la préfecture apostolique de Parakou, au nord Dahomey. Il est d'abord vicaire dans la ville de Parakou, puis curé et directeur des œuvres. Quand on lui demandait des renseignements sur ses années de mission, il répondait avec malice que toutes ses archives personnelles avaient fait les délices des termites et que ce qu'elles avaient voulu laisser avait été la proie des termites. La malice, il en a toujours eu et il aimait bien raconter des histoires. Chargé de la ville de Parakou, il s'intéresse de suite aux jeunes, et, avec l'aide d'un jeune dahoméen passionné de scoutisme, il implante le mouvement dans la ville dès le mois de décembre 1951. Cependant, il n'oublie pas ses origines de jociste. Le premier groupe est créé l'année suivante avec les jeunes ouvriers et apprentis, la plupart venus du sud du pays avec l'arrivée du chemin de fer à Parakou, et le développement des ateliers d'entretien et de réparation. Plus tard, il dira avec fierté que la plupart des jeunes de cette époque sont demeurés profondément chrétiens.
Dans la foulée de la J.O.C., naquit la J.E.C. au Cours Normal. Le père devait ainsi connaître un grand nombre de jeunes instituteurs du pays. Son activité ne s'arrêta pas là : il faudrait citer les mouvements de l'enfance (cœurs vaillants, âmes vaillantes, guides, J.O.C.F.) et aussi les mouvements d'adultes, et en particulier l'A.C.F. En plus des foyers mariés religieusement, j'acceptais les foyers monogames, susceptibles ou désireux de recevoir un jour le sacrement de mariage. Ces réunions ont été pour moi d'une richesse extraordinaire. C'est vraiment là que j'ai appris ce qu'était la vie du couple africain, avec tous ses problèmes financiers, matériels, sexuels, difficultés avec les familles du conjoint, l'éducation des enfants. Il faudrait citer aussi la Légion de Marie, les équipes enseignantes, le Secours catholique. Les constructions (agrandissement de la mission, la cathédrale bénie en 1958, les écoles) occupaient une bonne partie de ses activités, mais il ne ménageait pas son temps pour visiter toutes les familles, quartier par quartier, notant par écrit tout ce qu'il pouvait apprendre.
Après 18 ans à Parakou (1951-1969), il va encore passer 18 ans dans ce qui est aujourd'hui le diocèse de Kandi à l'extrême nord-est du pays, dans les missions de Banikoara et de Kandi, période qui sera coupée par une année de recyclage (avril 1972 à janvier 1973). Il a alors dépassé la cinquantaine, mais il ne craint pas de faire en voiture le voyage de retour au Dahomey. Il est conquis par le désert et refera le voyage une seconde fois à la fin d'un congé. A son arrivée, Banikoara représente une communauté chrétienne bien restreinte, il est seul et dit se plaire dans la solitude, mais bien vite il demande un vicaire. Dès 1971, il peut annoncer au père André Roux, ancien de la mission, que l'église est maintenant terminée : un gros souci en moins !
La fatigue, le climat, le fait de ne pas bien posséder la langue sont des obstacles qui ne l’encouragent guère. Nous sommes en pleine période révolutionnaire marxiste du Bénin. Beaucoup de chrétiens, surtout dans le nord où les communautés sont plus fragiles, arrêtent de venir à l’église. Le père se retrouve encore plus seul à Banikoara. Tout cela fait qu'il est tenté de tout abandonner vers 1978 et qu'il commence à penser à une nomination en France. A mots couverts, il écrit au Provincial disant qu'il est prêt à accepter une nomination en France si nécessaire, mais qu'il est prêt aussi à repartir en Afrique. Vous pouvez prendre le bateau, lui écrit le Provincial. Il comprend alors où la Providence le désire. A son retour, il est nommé à Kandi. On pourrait en écrire long sur les 9 années de son ministère dans cette ville. Signalons seulement qu'il a la joie de conduire un jeune bariba au grand séminaire en 1983 et qu'en 1987, peu avant de quitter, il a la fierté de remettre au médecin chef de l'hôpital un bloc opératoire tout neuf, grâce à la générosité et à la sympathie de tous ses bienfaiteurs. Il demande alors à se reposer ; il est nommé pour une année sabbatique : En fils obéissant, j'ai abandonné mon épouse que tes prédécesseurs m'avaient confiée, et me voilà revenu en exil en France, un peu désemparé, écrit-il au Provincial en juillet 1987. Lui qui a beaucoup semé au pays bariba sans récolter, il part alors que des communautés chrétiennes bariba commencent à se former. Les uns sèment, les autres moissonnent !
Après son année sabbatique, il va être supérieur de la maison de Rezé pendant 8 ans où il est apprécié. Il se met tout entier au service de ses confrères, dans la discrétion et le calme, regrettant de n'avoir pu rester plus longtemps dans l'ambiance de silence et de prière, et cependant très fraternelle et détendue, qu'il avait trouvée chez les Carmes, au Broussay, durant ce qu'il appelle pudiquement "un petit stage". Le calme, il va le trouver à la maison de retraite de Montferrier où il est nommé en 1997. Assez vite sa santé se détériore ; sa mémoire n'est plus ce qu'elle était, malgré quelques souvenirs précis. Depuis 2005, on peut dire qu'il n'est plus là. Il ne communique plus, il faut s'occuper de lui comme d'un enfant, le lever, l'habiller, le faire manger. Il vit sur son fauteuil roulant, mais il ne se plaint pas. Peut-être vit-il tout seul dans son passé ? Il s'éteint doucement le 11 janvier 2008, à 87 ans, lui dont le docteur disait qu'il ne vivrait pas longtemps après son ordination.
Il repose désormais auprès de ses confrères, dans le cimetière des pères des Missions Africaines, à Montferrier-sur-Lez.
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