Société des Missions Africaines - Province de Lyon
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Le Père Jean EVRARD né le 23 décembre 1927 à Graide (Belgique) dans le diocèse de Namur membre de la SMA le 27 octobre 1947 prêtre le 12 février 1951 décédé le 12 décembre 2009 |
1951 - 1952 Louvain, étudiant
1952 - 1956 Kisanji (Kikwit) décédé à Libramont (Belgique), le 12 décembre 2009 |
Le père Jean EVRARD (1927 - 2009)
Jean Evrard naît le 23 décembre 1927, dans une famille de cultivateurs, à Graide, commune rattachée aujourd'hui à Bièvre. On est là en pleine Wallonie, dans le diocèse de Namur, à une vingtaine de kilomètres de Chanly, d'Ave, de Givet, autant de noms qui vont évoquer bien des souvenirs chez les anciens. Huit enfants verront le jour dans cette famille d'agriculteurs profondément chrétiens, mais deux d'entre eux mourront en bas âge. Jean est le troisième enfant et le second garçon de la famille.
C'est avec une grande joie que ses parents accueillent son souhait de devenir prêtre missionnaire. Aussi, dès la fin de son école primaire, il est envoyé à Ave et Auffe pour ses études secondaires. Il y reste 7 ans, et c'est avec regret qu'il signale lui-même que "le petit séminaire ne délivrant pas de diplôme à cette époque", il quitte la maison sans grade académique reconnu. En 1945, il rejoint Chanly, à quelques kilomètres de là, pour y faire les deux années de noviciat. Puis, c'est le départ pour Lyon, pour le grand séminaire des Missions Africaines où, après 4 ans de théologie, il est ordonné prêtre en février 1951. Au cours de toutes ces années d'études, pendant les vacances d'été, il aimait organiser, pour les jeunes du village, des activités de jour et de nuit, et cela l'amusait beaucoup. Certains s'en souviennent encore.
Après une année passée à Louvain où il étudie la médecine coloniale et suit, comme élève libre, des cours de pédagogie, il est nommé au Congo, en 1952, où il va rester jusqu'en 1975. Il va consacrer une grande partie de sa vie à l'enseignement et se fera remarquer par ses talents de pédagogue, en particulier dans le diocèse de Kikwit, à Kisanji puis Kahemba. A Kisanji, il est nommé en 1958 directeur de l'école d'apprentissage pédagogique des futurs instituteurs, après avoir obtenu un diplôme de spécialisation pédagogique à Léopoldville en 1958. Il y reste quatre ans et les témoignages sont unanimes pour apprécier la qualité de la formation de ces maîtres, tant sur le plan pédagogique que sur les plans humain et chrétien. Cela ne l'empêchait pas d'aller visiter les communautés chrétiennes dans les villages d'alentour.
De 1962 à 1964, il est directeur de l'école secondaire de Kisanji. C'est à ce moment-là qu'éclate la terrible rébellion de Pierre Mulele dont fut victime, après tant d'autres, la mission de Kisanji. Cette belle mission fut complètement détruite et mise à sac. Les pères et les sœurs de la mission ont passé une semaine terrifiante, avec menaces de mort et humiliations de toutes sortes, pour être enfin libérés par les hélicoptères de l'ONU en janvier 1964. C'est un officier suédois qui vient audacieusement les récupérer et les soustraire ainsi aux insurgés, parmi lesquels le père avait reconnu plusieurs de ses anciens élèves. Jean et ses confrères ont été fortement traumatisés par ces bien pénibles événements. Ses proches n'ont pas oublié l'état dans lequel il rentra au pays, mais ils affirment que personne ne put jamais entendre la moindre critique, ni le moindre reproche, sur ce qui venait de se passer.
Avant la fin de l'année 1964, il repart au Congo et est nommé directeur de l'école secondaire de Shamusenga. Là, comme à Kisanji, il se fait remarquer par la rigueur et le sérieux avec lesquels il préparait ses cours et par l'attention qu'il portait à chacun de ses élèves. Nombreux sont les Congolais qui lui doivent la réussite de leur vie. Une année de recyclage à Paris en 1972-1973 lui permet de couper avec l'enseignement secondaire pour se consacrer uniquement à la formation des catéchistes. Mais, au bout de deux ans, en 1975, des problèmes de santé vont l'obliger à rentrer en Belgique, et jusqu'en 1977, il va encore enseigner et assurer l'aumônerie à Ciney, chez les Frères des écoles chrétiennes. Mais, cette soif d'apprendre et de s'instruire, cette qualité qu'il aimait et admirait le plus chez ses élèves congolais, les futurs maîtres ou les futurs catéchistes, il ne la retrouvera pas en Belgique.
En 1977, il s'installe à Bruxelles. Il est d'abord aumônier des Africains dont il est très apprécié, mais il s'est bien vite rendu compte qu'il ne s'agissait pas là d'un travail de tout repos. Il accepte alors de prendre la responsabilité de la procure sma de Bruxelles. Il apprécie qu'on lui fasse remarquer qu'il prend sa mission très au sérieux et il milite pour qu'on ne confie pas l'argent des missions à "des banques qui soutiennent l'armement et la bombe à neutrons". Les confrères ont toujours admiré sa disponibilité. C'est sa santé qui l'oblige à passer la main : "Dans ma jeunesse, j'étais asthmatique. Je n'ai pas eu de crise pendant 50 ans. Hélas, ça vient de recommencer, ce qui n'arrange rien." (07/11/1996) Quelques mois plus tard, il se plaindra d'insomnies, de douleurs lombaires, difficulté de marcher, vision trouble… Au moment où il est remplacé, en 1998, le Conseil provincial lui écrira : "Que de démarches en tout genre durant ces 17 années ! Certaines d'entre elles ont mis ta patience à l'épreuve. Tu as fait de la procure une maison accueillante, ouverte à chacun. Merci Jean pour le travail accompli au service de la Province et des confrères, et pour le travail missionnaire effectué auprès des bienfaiteurs et amis de la SMA."
Il continue cependant de résider à la procure de Bruxelles pendant quelques années encore, jusqu'en 2006, année où il rejoint la maison de retraite de Libramont juste à côté de l'hôpital, la résidence du Bois de Bernihé. Tant qu'il le pourra, il rendra tous les services dont il était capable "intervenant tantôt comme aumônier, tantôt comme animateur religieux, insufflant aux résidents du home un sens de l'accueil et de la solidarité, dans une ambiance décontractée et bon enfant dont il avait le secret." (d'une de ses nièces au cours des obsèques) Chaque dimanche, il célébrait la messe dans la chapelle de l'hôpital voisin. Il ne pouvait plus lire, mais il connaissait les prières par cœur. 15 jours avant sa mort, il a pu encore célébrer l'eucharistie. Il est mort très paisiblement, tout à fait conscient de ce qu'il l'attendait et avec une grande foi. La messe d'enterrement a été célébrée dans son village natal devant une assistance nombreuse et priante. Il est enterré dans le cimetière de Graide, là où reposent ses parents.
Pour terminer, voici encore quelques lignes du témoignage de l'une de ses nièces déjà citée plus haut : "Oncle Jean était comme ses frères et sœurs un grand garçon sans histoire, néanmoins remarqué très tôt par ses deux instituteurs, les maîtres Léonet et Collard, comme étant farceur, talent qu'il a su garder en devenant un prestidigitateur apprécié. Encore aujourd'hui, on raconte en famille quelques faits d'armes bien à lui : l'échange du beau crayon rouge et bleu contre le vieux clou de Bernard le filou. […] Nous ses neveux et nièces avons toujours été marqués par la richesse de sa personnalité et la multiplicité de ses talents, lui qui fut tour à tour prestidigitateur, boursicoteur, graphologue, compétences qui en a étonné plusieurs. Plus récemment, il a su goûter aux joies de l'Internet et des communications par mails, ce qui ne l'empêchait pas de rendre visite à l'un et à l'autre, pour déguster le fameux jambon des Ardennes."
Père Bernard Favier, sma
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