Société des Missions Africaines – Province de Lyon
![]() |
né le 2 mai 1923 à Douarnenez dans le diocèse de Quimper, France membre de la SMA le 2 décembre 1944 prêtre le 6 janvier 1949 décédé le 4 mai 2006 |
1950-1956 Kouandé, Bénin décédé à Douarnenez, France, le 4 mai 2006, |
Le père Yves GUILLOU (1923-2006)
Yves Théophile Marie Guillou est né à Douarnenez, le 2 mai 1923, et il fut baptisé le 6 mai. Son père était charpentier, construisant des bateaux de pêche, et sa mère, commerçante. Ils n’eurent que deux enfants qui arrivèrent à l’âge adulte : Yves, et sa sœur Annie. Après son école primaire à Douarnenez, Yves partit en formation chez les Spiritains : d’abord à Langonet (1935-1937), puis Allex dans la Drôme, et Saint-Hilan. Demandant à entrer aux Missions Africaines, il est admis à Martigné-Ferchaud en 1941. Il devient membre de la SMA le 2 décembre 1944, et commence sa théologie au 150 cours Gambetta à Lyon.
Du 30 mai 1945 au 11 juin 1946, il accomplit son service militaire dans la marine : après une campagne en Afrique du Nord, il fera 7 mois de campagne en Indochine. On signale que par sa conduite et ses qualités, il a exercé une excellente influence sur ses camarades. Revenu au 150 pour ses études de théologie, pendant les vacances, il rend service à la « Stella Maris », société sportive de la paroisse de Douarnenez où on parle de lui comme d’un entraîneur remarquable. Le 11 février 1949, il est ordonné sous-diacre, et reçoit l’ordination presbytérale le 6 juillet de la même année.
En novembre 1949, le père Yves Guillou reçoit sa nomination pour la préfecture apostolique de Parakou au Dahomey, sous l’autorité de monseigneur Faroud. Afin de faire des économies, pour le voyage, il se fait embaucher à bord d’un langoustier, en compagnie du père Roumier. Parti de Douarnenez, celui-ci les conduira jusqu’à Port-Etienne en Mauritanie. Là, ils trouveront un hydravion qui les mènera à Dakar, où ils pourront prendre un paquebot pour aller en Côte d’Ivoire, puis au Dahomey.
Monseigneur Faroud le nomme à la mission de Kouandé, où il rejoint le père Bréhier. Le père Guillou s’occupe de la mission et de ses stations, tandis que le père Bréhier, par son travail de transporteur, essaie de trouver les moyens de subsistance. En 1951, il écrit : Me voilà constructeur, maçon, charpentier. J’achève deux chapelles dont l’une est à 45 km de Kouandé. Toujours à vélo : le soleil chauffe et le pauvre missionnaire fond. Il obtient l’ouverture de 4 écoles officielles : celles de Kouandé, Tobré, Kérou et Guilmaro. Dès le départ, le père Guillou avait sa station préférée, Kérou, et c’est en 1956 qu’il s’y installe définitivement pour fonder une nouvelle paroisse.
A Kérou, le père sera très attentif aux problèmes de développement de la population. En 1960, il reçoit les religieuses béninoises OCPSP dont il construit la maison, puis un dortoir et un internat pour les filles. En 1967, on pourra ouvrir la maternité que le père a fait construire. Lorsque les supérieurs lui proposent un vicaire pour Kérou, il répond : Bien sûr que j’en prendrai soin avec tout mon cœur, car je sais par où je suis passé, et je ne voudrais pas que quelqu’un qui se trouve à mes côtés soit malheureux. Le père aura toujours le souci de ses confrères, spécialement de ceux de sa famille missionnaire.
En 1970, il vient s’installer à Brignamaro, non loin de Kérou, devenant le fondateur de cette paroisse. Malgré sa rudesse, il aime ce peuple : La population est sympathique, écrit-il. Il y a de braves gens dans ce pays qui ont bon cœur, qui savent s’aider les uns les autres. Le village est une grande famille. Il y a des gens qui savent réfléchir, penser. Il y a des sages dans le village. Il n’est pas besoin d’être lettré pour cela…Mais, pour devenir chrétien, l’heure de Dieu n’a pas encore sonné. Peut-être que nous ne sommes pas assez saints, ce qui est bien vrai. On fait pour le mieux, semant quand même la Parole. Un jour, elle trouvera une bonne terre pour germer.
En 1976, alors que le Bénin avait un gouvernement marxiste très strict, il connaît une mésaventure que nous relate le père Pierre Bio Sanou : Le père Guillou a été gardé à vue au commissariat central de Cotonou pendant 4 jours. Il a été libéré après avoir rencontré le ministre de l’Intérieur. Il a rejoint sa paroisse. Au cours de cette rencontre, le père Guillou n’avait pas eu peur d’affirmer, haut et fort, sa foi en Dieu, devant un ministre proclamant l’athéisme.
Le père Guillou se montre attentif aux conditions de vie des gens, et s’efforce de les améliorer grâce à un réseau fidèle d’amis et de bienfaiteurs. Ainsi, il répandra la culture attelée : J’ai donné bœufs, charrues et charrettes à des catéchistes et ils se sont bien débrouillés. Ils ont semé du maïs blanc et l’un d’eux en a récolté 8 tonnes. Il aura le souci de fournir de l’eau potable en faisant creuser des puits, quelquefois en affrontant le granit. Il aidera les villageois à améliorer leur habitat en leur fournissant du ciment. Souvent, il fera évacuer les malades graves vers l’hôpital qui est très loin. Sa plus grande réalisation sera le Centre de Santé de Brignamaro : il reculera même son départ pour la retraite en France, afin d’équiper ce Centre d’un grand bloc opératoire.
Homme de relation, le père Guillou aimait beaucoup recevoir dans sa mission isolée de Brignamaro. Cela se savait. Les visiteurs sont venus nombreux profiter de sa chaleureuse hospitalité. Parmi ses visiteurs, il reçut un jour un jeune artiste, à la fois peintre et poète, qui demeura quelques jours avec lui. Dans un livre, paru quelques mois plus tard, il parlera ainsi de celui qui lui avait, un jour, ouvert sa porte : Le père Guillou arrive et, avec lui, son charisme et son aura. Sa voix tonne. Ses yeux se plissent. Ses mots sont justes et malicieux. J’étais prévenu. Je ne suis pas déçu. Le père Guillou est aux Missions Africaines ce que Jean Gabin doit être au cinéma français.
Mais toutes ces activités de développement ne le détourneront pas du souci de faire naître des communautés chrétiennes, et de les nourrir de la Parole de Dieu. Dès le début de sa vie missionnaire, il manifeste une grande attention dans l’éveil et le soutien des vocations, convaincu qu’elles sont l’avenir de cette Église qui peine à naître en monde bariba. Il aura la joie de voir 4 jeunes hommes de Brignamaro devenir prêtres, et 3 jeunes filles devenir religieuses.
Il considérait l’abbé Donatien Sabi Sika comme son fils spirituel. Voici les conseils qu’il lui donnait en novembre 1992 dans l’homélie qu’il fit à l’occasion de la première messe du jeune prêtre à Brignamaro. Le père Guillou nous confie là ce qui lui a permis de tenir dans un contexte si difficile : Surtout, Donatien, aie une très grande foi en Jésus-Christ. Ne te décourage jamais, même si parfois la vie t’accable de son lot de peines, de soucis, même si parfois tu te sentiras las de travailler pour le Seigneur sans trop de résultats, même si parfois tu te sentiras mal aimé de tes paroissiens, même si parfois tu te sentiras seul pour supporter tes peines, tes déceptions qui ne manqueront pas… Alors pense que tu n’es jamais seul, que le Seigneur est avec toi, même s’il ne se fait pas sentir, et puise chez Lui le courage nécessaire pour continuer à le servir jusqu’au bout. C’est ainsi que j’ai fait, c’est ainsi que tous les missionnaires font. Et c’est pourquoi ils sont toujours joyeux.
En reconnaissance de ses mérites, plusieurs distinctions ont été remises au Père Yves Guillou :
- le 15 janvier 1988, il reçoit à Cotonou la décoration de Chevalier de l’Ordre National du Mérite, des mains de l’ambassadeur de France, ainsi que la médaille des Anciens Combattants de la guerre 1939-1945,
- le 27 novembre 1999, il reçoit la distinction papale Pro Ecclesia et Pontifice des mains du nonce apostolique,
- le 27 janvier 2001, il reçoit à Brignamaro la médaille de Grand Officier de l’Ordre National du Bénin.
En juin 2003, le Père Yves Guillou quitte Brignamaro après 53 ans d’Afrique pour aller poser son sac, comme il dit, dans sa ville natale de Douarnenez. Là, il vit une retraite heureuse dans la maison qui l’a vu naître, auprès de sa sœur Annie et de sa cousine Madeleine, fidèle à célébrer régulièrement l’Eucharistie dans son église de Douarnenez.
En mars 2006, de sérieux ennuis de santé le conduisent à l’hôpital. Bien soigné, il connaît un moment de répit, puis il faut de nouveau l’hospitaliser ; une embolie pulmonaire l’emportera le 4 mai 2006, à l’âge de 83 ans. Voici ce que son Evêque de Natitingou, monseigneur Pascal N’Koué, a écrit à la suite de la nouvelle de son décès, des mots qui montrent qu’il connaissait bien son vieux missionnaire : Après l’avoir eu dans ce diocèse comme un vaillant missionnaire ne reculant devant aucune difficulté, voilà que nous l’avons maintenant au Paradis comme un puissant intercesseur. Comme il aimait rouspéter, j’espère qu’il poussera l’Esprit-Saint à s’occuper davantage de Brignamaro.
Recherchez .../ Search...