Société des Missions Africaines – Province de Lyon
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né le 15 octobre 1931 à Resteigne dans le diocèse de Namur (Belgique) membre de la SMA le 25 juillet 1952 prêtre le 29 juin 1956 décédé le 2 octobre 2010 |
1957-1984 Kimbongo (Kikwit) en paroisse 1984-1987 Kambangu (Popokabaka), responsable décédé à Chanly (Belgique) le 2 octobre 2010, |
Le père Jean-Marie LAMOTTE (1931 - 2010)
Jean-Marie est né à Resteigne, dans le diocèse de Namur, en 1931. Tous les confrères qui ont fait le noviciat à Chanly sont familiers de ce nom, puisque ce village se situe à côté de Chanly, au sud de la Belgique. Il a trois sœurs et trois frères plus âgés que lui ; son papa, cultivateur, décède quand il est encore jeune et sa maman doit travailler pour élever ses enfants. Cinq de ses tantes et l'une de ses sœurs sont religieuses dans la même congrégation qui était chargée, entre autres, de la cuisine de notre noviciat. Certains n'ont pas oublié les pommes de terre qui revenaient régulièrement sur nos tables.
Il fait ses études au petit séminaire Sainte-Thérèse, à Ave, où il entre en 1944, puis au collège de Bellevue, à Dinant, et enfin à Pont-Rousseau où le supérieur note en 1950, au moment de son entrée au noviciat : "bon, timide, intelligence suffisante, bon en mathématiques". Après ses deux années de noviciat, il fait deux ans de théologie (1952-1954) en même temps que son service militaire au "Collegium clericorum in militia" à Alost, petite ville de Flandre Orientale, théologie qu'il termine par deux ans à Lyon au 150. Il est ordonné en 1956 et va passer plus de 40 ans de sa vie missionnaire en République Démocratique du Congo !
Il commence par rester 6 mois à Shamusenga, le temps de s'initier à la langue véhiculaire de la région, le kikongo, puis il est envoyé à Kimbongo, chez les Basuku, une mission de 150 km sur 100, avec le père Toussaint comme supérieur. Les débuts sont difficiles, le supérieur est un homme austère qui attache peu d'importance à la nourriture. Mais quand on est jeune… Heureusement, le gibier ne manque pas dans les environs et, de temps en temps, une partie de chasse permet d'améliorer l'ordinaire. Il va rester 27 ans à Kimbongo et se définit lui-même comme "vicaire itinérant" : ailleurs, on dirait qu'il est chargé des villages. Il va ainsi contribuer à développer et à organiser des postes secondaires de brousse : la paroisse en comptera sept. Dans les deux postes dont est chargé Jean-Marie, il va mettre au point une certaine autonomie financière, organiser la pastorale et la formation chrétienne, apporter son aide dans le service de la santé, mettre sur pied tout un système de formation pour les catéchumènes (alphabétisation, hygiène, alimentation, animation rurale).
Très proche des gens, il avait le contact facile et savait écouter et conseiller ; il aimait partager les événements importants de la vie des populations villageoises dont il était chargé : maladies, deuils, naissances, mariages, drames familiaux, conflits, tout ce qui fait la vie d'une communauté. Accueillant pour tous, jamais scandalisé par ce qu'il voyait ou entendait, il savait garder en toutes circonstances son humour et un sourire malin. Il mettra son point d'honneur à bien organiser ses postes secondaires : construction d'une maison pour le père, avec une chambre de passage et une salle de réception pour des échanges libres, le soir, avec tous ceux qui voudront causer, un dortoir pour les catéchumènes lors des sessions, une maison pour le responsable laïc avec qui il reste en contact permanent.
Une chose importante qu'il laisse derrière lui à Kimbongo où il a passé la plus grande partie de sa vie missionnaire, c'est bien l'élevage du gros bétail. Avec le père Leroy, il a été le pionnier de l'introduction du gros bétail dans cette vaste région du Feschi. Son nom, dans la mentalité et l'esprit de tous les Basuku, reste indéfectiblement attaché à cette activité et à sa réussite : personne n'y croyait ; pour tous, c'était une aventure insensée, un gaspillage d'argent tant la nature du sol était classée par les agronomes comme impropre à une telle activité. Avec le père Leroy, il fera un premier essai avec 4 femelles. La première vache à mettre bas décèdera dès le jour suivant… Que faire ? Laisser mourir le veau ? le tuer et le manger ? Il choisit l'option du biberon et le veau grandit rapidement avec une affection particulière pour les pères. Il lui arrivait d'aller à leur suite au réfectoire, mettant son museau sur le bord de la table et les regardant.
Au fil des années, ce minuscule élevage allait se développer considérablement pour dépasser bientôt le millier de bêtes. Les villageois, au début totalement incrédules et même méprisant devant une telle entreprise, manifesteront bien vite leur désir d'acquérir au moins une bête pour démarrer à leur compte leur propre élevage. Une quinzaine d'années plus tard, la région de Feshi Kimbongo est devenue la première de tout le diocèse de Kikwit quant au nombre de têtes de bétail et au nombre de villageois éleveurs. Une région déshéritée est devenue, par un choix jugé totalement hasardeux, une région grande productrice de viande bovine ; les habitants en sont fiers. Nous comprenons dès lors que le nom de Jean-Marie, avec ses connaissances, sa compétence et sa gestion rigoureuse des troupeaux, soit aujourd'hui encore, et pour longtemps, lié à l'élevage du gros bétail.
En 1974, il avait été contacté pour être économe au 150. Il avait commencé par donner un oui de principe, puis avait refusé, et enfin avait accepté. Arrivé au 150 au printemps 1975, il n'y restera que trois semaines avant d'envoyer sa démission au Conseil provincial qui répond de façon laconique : "Nous prenons acte simplement de ta décision et nous te donnons le feu vert pour ton retour au Zaïre qui ne saurait tarder, puisque tu es en fin de congé et que tu es attendu là-bas." (25 avril 1975)
Il retrouve donc le diocèse de Kikwit et la mission de Kimbongo jusqu'en 1984. A ce moment, quelques problèmes personnels l'amènent à demander son changement de diocèse. Il est alors nommé curé de la paroisse de Kambugu, dans le diocèse de Popokabaka où il reste trois ans pendant lesquels il hésite entre une incardination dans un diocèse du Congo ou dans son diocèse de Namur. Malgré ses hésitations, il reste dans la SMA et, en 1987, il retrouve pour 5 ans son ancien diocèse de Kikwit, à Feshi, puis Kimbulu. Le Conseil provincial lui propose alors un travail auprès des migrants à Bruxelles ou une place dans une des maisons d'animation de France, ou encore, avec l'accord du généralat, une place au foyer sma de Bangui. Il aurait bien accepté cette dernière proposition "si j'avais seulement 10 ans de moins", précise-t-il. Finalement, il s'engage dans son diocèse et est nommé curé à Bièvre puis à Houyet.
Sans prévenir ses supérieurs, en 2002, il quitte la Belgique et débarque à Kinshasa. Le Conseil provincial lui rappelle alors qu'il n'a pas son accord et que normalement il n'est parti que pour une visite. Il faut attendre 2003 pour que sa situation soit réglée entre le Conseil provincial et le cardinal de Kinshasa : il est mis alors officiellement à la disposition de la région RDC. Bien sûr, c'est lui qui va s'occuper de la ferme des bovins qui appartient à la paroisse, mais qui se trouve à 140 kms de là ; il y passe plusieurs jours par mois pour surveiller le travail et les finances et régler les problèmes. En décembre 2006, il sera même nommé vice supérieur de la Région sma du Congo.
En 2008 - il a maintenant 77 ans - il rentre définitivement dans son pays et l'évêque le nomme prêtre auxiliaire à la paroisse de Hour-Avenne. Il est intéressant de noter que le curé de la paroisse de Hour, le père Henri Tamuzi, est un prêtre congolais, tout comme celui de Resteigne, et qu'il seront tous les deux présents aux obsèques. Le curé de Resteigne, le père Freddy Mulopo, dira au cours de la messe d'enterrement : "A Kinshasa, Jean-Marie a été nommé à la paroisse Saint-Barthélemy, à Masina. Masina est la commune où habite ma famille. Jean-Marie a connu ma famille, mon père et mes frères."
En septembre 2010, Jean-Marie est victime d'une thrombose avec paralysie du côté droit. Ce sont des paroissiens qui ont été obligés de forcer sa porte d'entrée, puis celle de sa chambre. Rapidement, il est conduit à la clinique Saint-Vincent de Dinant, près de Namur. Il n'y reste pas longtemps, car les conséquences sont graves et irréversibles : en particulier il est paralysé de la gorge, ce qui l'empêche de déglutir, donc de se nourrir normalement ; il faut le nourrir directement dans l'estomac. Il est transféré alors dans l'ancien noviciat de Chanly, transformé aujourd'hui en maison de retraite pour personnes âgées. Son état de santé se dégrade rapidement, la fièvre monte et les poumons sont encombrés. Au début, il essayait de parler, mais assez vite il ne peut plus le faire. Durant ses derniers jours, tantôt lucide mais faible, tantôt dans le coma, il est resté très entouré par les membres de sa famille, des nièces en particulier, et les deux confrères sma résidant à Chanly. Il s'est éteint le 2 octobre et repose désormais à Resteigne, dans son village natal.
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