Société des Missions Africaines – Province de Lyon
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né le 26 avril 1924 dans le diocèse de Poitiers (France) membre de la SMA le 21 juillet 1943 prêtre le 24 février 1947 décédé le 14 octobre 2008 |
1947-1948 Baudonne, professeur
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Le père René MÉNARD (1924 - 2008
Né en 1924 dans les Deux-Sèvres, diocèse de Poitiers, René Ménard appartient à une bonne famille chrétienne. Son papa est clerc de notaire ; il a trois frères et une sœur, et l'un de ses frères a fait le petit séminaire de Montmorillon où il étudie lui-même, après avoir passé quelques années à l'école cléricale de Châtillon-sur-Sèvre. Il obtient la première partie du baccalauréat et échoue à la seconde partie, malgré une bonne moyenne annuelle en philosophie. Il n'a alors que 17 ans et on peut s'étonner qu'on ne lui ait pas demandé de redoubler pour qu'il obtienne son baccalauréat complet : la guerre, la France occupée, le désir de se retrouver en zone libre, autant de raisons qui peuvent expliquer qu'en octobre 1941, il arrive au Rozay, près de Lyon, pour y faire ses deux années de noviciat. Le père Kern, supérieur du noviciat, le note ainsi en 1943, avant son admission au premier serment : "franc, dévoué, bon cœur, rien de défavorable ; sa nature expansive et sa démangeaison de parler l'exposent cependant à faire des impairs ; bien appliqué à ses différents devoirs, énergique au travail manuel." Son dossier signale qu'il est organiste.
Il fait partie de la classe 1944 qui n'a pas été appelée sous les drapeaux : voilà pourquoi il n'a pas encore 23 ans lorsqu'il est ordonné prêtre, et plus de quatre mois avant la fin des quatre années de grand séminaire. Il est nommé professeur à Baudonne où, en plus de ses classes, il va s'occuper aussi du chant. C'est précisément à cause des chants liturgiques qu'un différend l'oppose au père Castanchoa, le supérieur de la maison qui, dit-il, ne connaît à peu près rien dans le domaine de la musique. Ce différend prend sans doute des proportions assez importantes puisque, trois mois après sa nomination à Baudonne, il reçoit une nomination pour l'Egypte, pour remplacer deux confrères malades, précise le texte. Il accepte ce changement un peu comme une sanction, mais, bien vite, demande des renseignements sur l'Egypte et ajoute dans sa lettre au provincial qu'il est heureux d'aller en Egypte quelques années, surtout à cause de la liturgie et du rite oriental ; il conclut sa lettre en disant qu'il ne regrette qu'une chose : "être classé officiellement comme mauvais sujet sans avoir eu à justifier ma conduite qui, à mon avis, n'a rien de criminel."
Ce premier séjour en Egypte va durer cinq ans. Il travaillera successivement, en paroisse et chargé des écoles, à Zifta, puis à Mahalla et enfin au Caire. Il s'intéresse beaucoup à la musique copte et précise, dans une lettre de 1953, qu'il n'a "jamais prétendu être spécialiste de la musique orientale, mais être bien spécialisé en musique copte, ce qui est un peu différent". Et il cite un témoignage fort en sa faveur donné par un docteur en musicologie de l'Université de Berlin. Le père Muyser lui-même l'engage à poursuivre des études musicales en France, ce qui aurait, dans le même temps, l'avantage de l'éloigner pour un temps de l'Egypte où il ne fait pas l'unanimité parmi les confrères. Le Conseil provincial préfère l'envoyer alors en Afrique Noire, dans la préfecture de Bouaké, en Côte d'Ivoire, "où vous pourrez faire, j'imagine, une aussi belle carrière missionnaire qu'en vous spécialisant en musique". (lettre de juillet 1953) Il doit donc abandonner son désir de se spécialiser en musique copte et écrit à Mgr Duirat qu'il "vient en Côte d'Ivoire par pure obéissance, mais sans conviction ni enthousiasme ; il paraît que l'enthousiasme est une vertu de jeunesse, j'ai donc bien vieilli." Et pourtant, il n'a pas encore 30 ans…
A Béoumi, pendant quatre ans, il va faire ce qu'il faisait en Egypte : travail ordinaire sur la mission et direction des écoles. A la fin de son séjour, il est envoyé au Congo, où, pendant 12 ans, il va travailler dans le diocèse de Kikwit. Dans ces deux pays, il reste très intéressé par tout ce qui touche à la musique : il fait une étude sur les instruments de musique baoulé ; il regarde de près la liturgie zaïroise ; au cours de l'un de ses retours pour son congé, il s'arrête quelque temps au Cameroun où il peut "assister, à Yaoundé, à une messe vraiment africaine, non seulement par le rythme des instruments, mais surtout par l'ensemble des rites eux-mêmes : j'ai pu enregistrer la plus grande partie des chants".
Pendant les deux années qu'il va passer à Paris à partir de 1973, il se trouve une occupation rémunérée au bureau d'aide sociale, ce qui lui permet d'être autonome et de continuer ses travaux sur la musique copte et sur les instruments de musique baoulé. Il réalise à son compte un vieux rêve du père Muyser : faire l'inventaire des manuscrits coptes de la Bibliothèque nationale. Il retourne ensuite au Congo, d'abord dans son ancienne paroisse, à Kimbulu, puis il passe dans le diocèse de Kinshasa où il s'engage pour deux ans au Centre d'Action pour les DIrigeants et Chefs d'Entreprise Congolais, le CADICEC. Ensuite, il prend lui-même des contacts avec l'UNESCO pour participer à un projet d'ordre musicologique. Là, il se sent vraiment à l'aise, il établit des fiches et collabore à une exposition d'instruments de musique. Cette collaboration prévue à l'origine pour une année durera en fait trois ans.
Sa grande vénération pour le père Muyser le fait retourner en Egypte en 1987 pour terminer le relevé de son ancienne bibliothèque : plus d'un millier de titres, parmi lesquels plusieurs centaines ont été soigneusement annotés par le père, ce qui constitue une documentation de première importance. […] Et dire que tout cela a failli être brûlé à Sakakini !
En janvier 1991, il est mis à la disposition du Régional du Zaïre. C'est lui qui va superviser la construction du nouveau foyer sma à Kimwenza. En 1993, des ennuis cardio-vasculaires l'obligent à passer quelques mois en France ; en 1996, il sera même rapatrié sanitaire, mais pourra repartir en juillet 1997 pour terminer la construction. Quand il rentre définitivement en France en 1998, la chapelle est terminée ainsi qu'une nouvelle citerne de 120 m3. Nommé alors à la maison de la rue Crillon, à Paris, il passe le plus clair de son temps à s'occuper de musique : musique copte, musique africaine, grande musique. Ses connaissances et sa compétence lui valent même d'être invité officiellement en Allemagne, en 2000, pour les 250 ans de la mort de Jean-Sébastien Bach.
Atteint de la maladie de Parkinson, il est toujours resté un confrère agréable de compagnie, un homme fraternel avec qui il faisait bon vivre. Sa maladie se traduisait par des difficultés de locomotion et une grande maladresse dans ses gestes, mais elle n'a jamais tempéré son intérêt pour la musique. A Montferrier, où il est arrivé en 2002, sa chambre était un véritable studio d'enregistrement et il possédait un nombre incalculable de cassettes et de CD. Il enregistrait des émissions de musique à la télévision et prenait grand plaisir à les regarder ensuite. Malgré sa marche difficile et une fracture du bras en 2007, il a toujours gardé bon moral. Il venait même récemment de se brancher sur Internet. Des faiblesses au niveau des artères coronaires ont nécessité son hospitalisation à Montpellier, et c'est une rupture d'anévrisme qui l'a emporté dans la matinée du 14 octobre à l'hôpital. C'est dans le petit cimetière sma, à Montferrier, qu'il écoute désormais la musique des anges.
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