Société des Missions Africaines – Province de Lyon
Le père André GUÉRET
Né le 5 décembre 1931 à Nantes,
Ordonné prêtre le 15 février 1958
1958-1964, Pont-Rousseau, professeur de lettres
1964-1968, Daoukro (Bouaké), vicaire
1968-1969, Lyon, 150, directeur spirituel
1969-1972, Chamalières, supérieur du noviciat
1972-1983, Dimbokro (Yamoussoukro), curé
1983-1994, Bouaké, curé de la cathédrale et vicaire général
1994-2002, Daoukro (Bouaké), curé
2003-2005, Abidjan, rejoint Saint-Michel d’Adjamé en septembre
2006 : aux Hidalgo, depuis Noël 2005 jusqu'au 1er mai 2006
2006 : à Rezé, à compter du 1er mai 2006
2017 : à la communauté de Montferrier
décédé le dimanche 10 avril 2022
à l’âge de 91 ans à Montferrier
Ses funérailles ont été célébrées
le mercredi 13 avril 2022 à 16 h
en la chapelle de la maison sma de Montferrier
Homélie
Funérailles du père André Guéret
« Le Seigneur en a besoin »
Dimanche dernier, nous venions de terminer la célébration des Rameaux lorsque nous avons appris le décès de notre frère André. Alors que nous célébrions la commémoration de l’entrée du Seigneur à Jérusalem, André entrait dans la Jérusalem nouvelle et éternelle, la Jérusalem d’en haut, celle qui est notre avenir à tous et qui désormais est le pré-sent de notre frère.
Comme Jésus, entouré par la foule en liesse à l’entrée de Jérusalem, André a dû être accueilli par l’immense foule céleste qui chante Hosanna au rythme des tam-tams qui résonnent à l’entrée du roi.
André qui fut un fin musicien et qui a enseigné la musique dans ses années de professorat a dû certainement apprécier cette entrée festive dans l’espace sacré du ciel.
Je me suis remis à méditer cet évangile en pensant à André qui siège désormais à la place des Justes auprès du Seigneur. J’ai remarqué plus que d’habitude, que Saint Luc parle du petit de l’âne par 8 fois directement ou indirectement en quelques lignes. Le quart de ce texte est consacré à l’ânon. Cet animal si familier dans certains pays d’Afrique et de plus en plus en vogue dans nos contrées avait déjà beaucoup d’importance pour les petites gens qui suivaient Jésus en Palestine.
Depuis 5 ans qu’André était dans cette maison, heureux d’être auprès de ses confrères avec lesquels il a collaboré sur le terrain de la mission, il a au cours de sa promenade quotidienne, certainement fixé son regard sur les ânes qui sont chez le voisin, toujours au ras du grillage attendant une main généreuse pour satisfaire leur gourmandise. Les contemplant, méditatif, Il a peut-être aussi imaginé que pendant ses 64 ans de vie missionnaire, le Seigneur a eu besoin de lui comme il a eu besoin de l’ânon de l’évangile pour entrer à Jérusalem. « J’avance comme un âne » avait écrit, le cardinal Etchegaray. André aurait pu l’écrire de la même manière avec une plume vive et avec une écriture extraordinairement fine qu’il a gardée longtemps, une écriture que l’on trouvait sur tous les tableaux noirs des écoles primaires de son temps.
L’âne de l’Evangile porte Jésus sur son dos. C’est sa mission. Il est le plus humble de tous les animaux et n’est jamais récompensé à la mesure de son travail et de sa disponibilité. Il ne refuse jamais le service qu’on lui demande. On peut le détacher si on a besoin de lui comme les disciples l’ont fait sur l’ordre de Jésus dans le village en face de Béthanie parce que tout simplement le Seigneur en avait besoin.
Qui peut s’opposer ? personne, surtout pas les propriétaires qui savent qu’il doit être au service de tous sans exception. L’âne est toujours réquisitionné parce que son cœur est en permanence à l’ouvrage. De la naissance à la mort, c’est son destin.
Il ne change pas comme le souligne un proverbe sahélien : « l’âne peut aller à la Mecque, il n’en reviendra pas pèlerin ».
Personnellement au Sahel, il m’est arrivé de prendre l’âne que je trouvais sur mon chemin de sable pour m’aider à porter les bagages trop encombrants pour moi, vers les campements les plus reculés.
Personne dans la famille d’André et dans son entourage ne s’est opposé à sa vocation missionnaire lorsqu’à 12 ans il entrait au séminaire à Pont Rousseau parce que, tout simplement le Seigneur avait besoin de lui. Pendant toute sa vie missionnaire, qu’elle soit en Côte d’Ivoire pendant 36 ans ou en France pendant 28 ans, André sera toujours disponible pour répondre aux différents appels de ses supérieurs et de ses Evêques.
Lui aussi sera constamment réquisitionné comme l’est l’âne lorsqu’on a besoin de lui. On ne lui demande pas s’il est prêt, il faut qu’il le soit. Ce fut ainsi pour André. À peine avait-il commencé un ministère paroissial à Daoukro où il était heureux et enthousiaste tant le travail était passionnant, même s’il fallait passer rapidement du « goupillon à la pioche » ou de la « plume au camion », il est contacté pour être directeur spirituel à Chanly ou à Lyon. Et comme le petit ânon, il est détaché pour prendre la direction qu’on lui indique sans récriminer.
André écrivait: « J’accepterai dans l’obéissance toute nomination à un poste où vous me jugerez utile, malgré la souffrance que j’éprouverai à quitter Daoukro. »
On penserait que c’est une réponse encore toute façonnée par la flamme ardente de l’ordination qui avait eu lieu 3 ans auparavant mais pas du tout. Cet esprit d’obéissance, il le gardera jusqu’au bout. Lorsque notre Conseil lui avait écrit qu’il devrait se préparer à rentrer à Montferrier, il avait écrit : « Je serai flexible à vos désirs ». Un âne a la peau dure. Malheureuse la voiture qui le cognerait, sa carrosserie ne s’en remettrait pas. Mais il a un cœur tendre. André, dès ses premiers pas dans le sacerdoce paraissait comme ayant une volonté ferme et parfois rigide mais aussi un caractère sensible.
Quelques événements dans sa vie missionnaire vont le déstabiliser au point qu’il lui faudra se reprendre spirituellement, loin de ses lieux de mission. Il passera une année au Canada d’où il reviendra et restera actif comme au temps de ses premiers pas en Afrique tout en se déclarant : « être ici un peu comme la roue de secours. » Il était alors prêtre habitué à Saint Michel d’Adjamé.
Il n’a pas été qu’une roue de secours. Il a été aux avant-postes des responsabilités importantes comme lorsqu’il fut Vicaire Général de Bouaké. « C’était un géant dans ce diocèse » disait un confrère qui l’a bien connu et qui était en admiration sur tout ce qu’avait fait André.
Comme l’ânon de l’Evangile qui se donnait à Jésus sans condition, sans attendre une reconnaissance quelconque, dans la gratuité la plus totale, s’offrant tel qu’il était, comme il était, André a offert sa vie au Verbe de Dieu avec amour, vérité et intelligence.
Il a toujours marché d’un même pas, sûr et constant comme savent le faire les ânes qui n’ont pas besoin de coups de bâton pour avancer là où leur maître leur dit d’aller.
Nous sommes à la veille du Jeudi-saint, fête du sacerdoce. Accompagner notre frère en ce jour est une grâce. C’est une belle récompense que le Seigneur lui accorde pour lui avoir été fidèle en tout et pour l’avoir conduit là où il n’y a ni piste ni chemin pour rejoindre le cœur de l’homme.
André a été détaché de sa famille, de sa région nantaise si chère à son cœur, tout simplement parce que le Seigneur en avait besoin.
« Seigneur reprends-le, il a besoin de toi maintenant et mets-le sur tes épaules comme la brebis préférée du troupeau. » Amen.
Michel Cartatéguy
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