Société des Missions Africaines – Province de Lyon
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né le 27 juin 1915 à Prokowo (Pologne dans le diocèse de Chetmno membre de la SMA le 24 juin 1936 engagement définitif le 24 juin 1942 décédé le 18 janvier 2010 |
1936-1940 Haguenau, imprimerie 1940-1995 Lyon, 150, imprimerie décédé à Montferrier-sur-Lez, le 18 janvier 2010, |
Le frère Joseph LASKA (1915 - 2010)
Avec le frère Joseph Laska disparaît le dernier représentant de la première génération des sma polonais rentrés à Ninino avant la guerre de 39-45.
Il est né à Chetmno le 27 juin 1915, dans le diocèse de Prokowo, en Pologne. Après ses études primaires dans sa ville natale, il fait quatre années d'études secondaires à Kartuzy, dans la région de Gdansk. C'est alors qu'il rentre aux Missions Africaines, à Ninino, pas loin de Poznan le 1er mai 1933 : il va avoir 18 ans. Quand il arrive l'année suivante à Vigneulles pour y faire ses deux ans de noviciat comme aspirant frère, le supérieur note dans son dossier : "Parle un peu le français, n'a aucun métier, mais travaille bien pour l'agriculture." (01/06/1934). Deux ans plus tard, au moment d'émettre son premier serment, on dit de lui : "Consciencieux, intelligence pratique, parle assez bien le français, répare assez bien les souliers." (27/05/1936). Quand il fait sa demande de renouvellement de son serment en 1938, il précise : "Je suis décidé de faire toujours mon devoir. Je fais ma demande en connaissance de cause et par motif surnaturel". (28/05/1938) Il répétera cette même formule pour sa demande de serment perpétuel en 1942. Dès la fin de son noviciat, en 1936, il est envoyé à Haguenau, maison de la Province de Strasbourg, à laquelle sont rattachés alors les confrères venus de Pologne. Il travaille à l'imprimerie.
Printemps 1940, c'est l'invasion allemande dans l'est de la France. Il faut quitter la place. Haguenau est évacuée : le frère Joseph est alors envoyé à Lyon, au cours Gambetta. Nous sommes le 25 mai 1940. Sa place est toute trouvée, c'est l'imprimerie ; il va y travailler, dans les catacombes du 150 comme il aimait à le dire lui-même, c'est-à-dire dans le sous-sol, jusqu'au 15 mars 1995, date à laquelle il rejoindra la maison de Montferrier : 55 ans de tâche obscure, cachée, dans le bruit des machines, à l'abri des regards, discret mais efficace, toujours serviable, payant de sa personne pour finir à temps un travail que les confrères attendent, un vrai professionnel, amoureux du travail bien fait, ennemi de l'improvisation et de l'à-peu-près, toujours disponible, un confrère heureux, plein d'humour, estimé de ses confrères pour ce qu'il était et pour l'attention qu'il portait à chacun.
Il est incorporé à la Province de Lyon le 3 mai 1947. "J'ai le plaisir de vous annoncer que, par une lettre en date du 5 mai 1947, le très révérend père supérieur général nous signale que le Conseil généralice a accepté votre transfert de la Province de Strasbourg à celle de Lyon. A partir de ce jour, vous faites partie de notre Province de Lyon, et nous sommes sûrs que vous vous emploierez de tout votre cœur aux tâches que vous seront confiées." (09/05/1947)
Membre d'une Société missionnaire pendant près de 75 ans, n'aurait-il jamais connu l'Afrique ? Si. Il la découvre au cours d'un voyage en février et mars 1972. Sur une proposition de ses supérieurs, il visite les missions de Côte d'Ivoire et du Bénin, en partie avec un membre du Conseil provincial, et chacun est heureux de l'accueillir, de lui faire découvrir un pays qu'il ne connaissait que par les écrits qui passaient entre ses mains, de lui faire connaître certains aspects de la vie dont il avait rêvé, de lui montrer aussi l'utilité de son travail d'imprimeur. Voici ce que lui dit le père provincial le jour de son jubilé d'or en 1986 :
"Essayons d'imaginer un instant ce qu'aurait été la vie des missionnaires qui durant 50 ans ont eu la joie d'œuvrer sur le terrain en Afrique, sans le travail obscur du frère Joseph. Le frère leur a tout simplement fourni le matériel nécessaire et indispensable pour mener à bien leur tâche missionnaire : livres de catéchèses, missels en diverses langues, traductions des évangiles, etc. Ceci pour l'Afrique. Et lorsque, de plus, on regarde la somme des publications passées entre ses mains pour éveiller la conscience missionnaire des chrétiens d'Europe : l'Almanach noir, l'Echo des Missions Africaines, Père, parlez-nous de votre Afrique, Datine le Derba, le calendrier annuel et j'en passe…, lorsqu'on voit tout ce travail, on peut dire en toute vérité que le frère Laska a été, derrière sa rotative, un grand missionnaire pour l'Afrique. Combien de jeunes n'ont-ils pas répondu à la vocation missionnaire, en lisant l'une de ces nombreuses publications, sans se rendre compte qu'elles étaient le fruit du travail fastidieux d'un petit frère dans les sous-sols du 150 ?"
En 1956, il avait eu la joie de retourner dans son pays. Quelle émotion, mais aussi quelle joie : "Je me trouve déjà chez moi. C'est après quatre jours de voyage que je suis arrivé finalement chez ma mère. Mon voyage était assez pénible, mais la joie était plus grande une fois à la maison." (08/08/1956) Plus tard, en 1967, il demandera et obtiendra d'être naturalisé français. En plus de son travail d'imprimeur, il se spécialise dans la réparation des montres. Comment ? Il est allé chez un horloger à Lyon, lui a demandé des conseils, quelques outils, et ainsi, petit à petit, par la pratique, il est devenu un bon réparateur. De nombreux confrères ont eu recours à ses services. A Montferrier, il a continué cette activité tant que sa vue le lui a permis.
En 1969, un grave accident de mobylette l'arrête pendant plus d'une année. A cette époque, on roulait sans casque de protection. Responsable en rien dans cet accident, il s'en tire avec un traumatisme crânien sans perte de connaissance, une luxation à l'épaule gauche et une fracture du fémur droit. Pour l'anecdote, on peut noter parmi les sommes remboursées par les assurances : 3.500 francs au titre du pretium doloris et 500 francs au titre du préjudice esthétique (!) Le Conseil provincial porte ces deux sommes au crédit du frère, en terminant sa lettre par ces deux mots : "Bonne santé !"
En 1987 (il a alors 72 ans), la Province lui demande s'il veut prendre sa retraite (bien méritée) à Montferrier, ou s'il veut encore continuer son travail à l'imprimerie (02/05/1987). Il répond : "En réponse à votre aimable lettre, je crois que je peux encore travailler au 150, car la Providence m'accorde encore une santé respectable. En plus, je ne voudrais pas croiser déjà les bras. Mon plus grand plaisir, c'est de rendre encore les petits services pour la mission et pour la plus grande gloire de Dieu." (16/05/1987) Il est donc renommé au 150. Mais en 1993, la Province l'avertit officiellement que l'imprimerie du 150 va disparaître et lui adresse une lettre de remerciement pour tout le travail accompli. "La fin de ce travail vous touche très certainement. […] De la même manière, le confrère qui doit quitter sa mission, ou son pays d'accueil, a aussi le cœur meurtri. […] A partir du sous-sol du 150, vous avez beaucoup œuvré pour la mission. Au moment où toute trace matérielle de cet important service va disparaître, le souvenir ne peut s'en effacer chez ceux qui en ont été les bénéficiaires." (27/10/1993)
Il rejoint la maison de Montferrier en mars 1995, le même jour que je frère François. Là, il continue à être le confrère un peu effacé, mais de très bonne compagnie, que chacun appréciait. La réparation des montres l'occupera encore pendant quelques années. Ces derniers mois, ses forces déclinaient peu à peu, mais rien ne laissait prévoir une issue aussi rapide. Le 18 janvier 2010, après le repas du soir qu'il avait pris normalement au réfectoire, on l'avait aidé à se mettre au lit. Deux heures plus tard, l'un des membres du personnel est monté dans sa chambre pour voir si tout allait bien. Il était mort sans déranger personne…
En guise de conclusion, voici quelques lignes du supérieur actuel du District-en-formation Pologne : "Pour nous, les jeunes polonais du District-en-formation Pologne, le décès du frère Joseph Laska termine une époque d'histoire de la SMA en Pologne, liée avec la maison de formation à Ninino et avec les premières structures de la SMA dans notre pays. L'ouverture du petit séminaire sma à Ninino le 15 septembre 1931 a donné le commencement de l'histoire de la SMA en Pologne, et elle continuait avec l'engagement des missionnaires polonais en Afrique et en Europe pour la Mission. Aujourd'hui, nous sommes conscients d'un héritage spirituel reçu de nos confrères qui nous ont précédés, et nous sommes fiers de leurs témoignages qu'ils ont donnés pour que l'évangile du Christ soit connu parmi les peuples africains." (20/01/2010)
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