Société des Missions Africaines – Province de Lyon
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né le 15 mai 1920 à Saint-Maurice la Fougereuse dans le diocèse de Poitiers (Deux-Sèvres) membre de la SMA le 25 juillet 1950 prêtre le 3 juin 1953 décédé le 22 février 2012 |
1954-1958 Le Rozay, responsable 1958-1959 Man, vicaire, chargé des travaux décédé à Montferrier-sur-Lez, le 22 février 2012 |
Le père Henri Guy CHALOPIN (1920-2012
Né le 15 mai 1920 à Saint-Maurice-la-Fougereuse (Deux-Sèvres), diocèse de Poitiers, il est le troisième d'une famille rurale de 12 enfants. A la maison, la vie est rude ; les ressources du papa, ouvrier agricole ne permettent pas au jeune Henri de suivre ses études convenablement, car les ressources ne sont pas très abondantes. Laissons-le lui-même s'expliquer quand en 1947 il fait sa demande pour entrer aux Missions Africaines.
"A l’âge de huit ans, il (mon père) me retira de l’école laïque, et m'envoya dans une ferme garder un troupeau de vaches et de moutons. Hélas, ce que j'avais appris fut bien vite perdu. Quoique les mois d'hiver, je retrouvais mes camarades sur les bancs de classe, eux avançaient tandis que moi je restais en deuxième division. Mes onze ans n'étaient pas encore sonnés quand je sentis en moi l'appel du Seigneur : "Viens et suis-moi". Là, commença la lutte. Je le dis à ma mère qui, elle-même, le transmit à mon père. Une discussion s'ensuivit sur ce sujet ; alors, je résolus de me taire en voyant que la vie de famille à la maison était trop précaire et que mon père avait besoin de moi. Ce ne fut que dix ans plus tard que cet appel revint et se fit entendre plus fort qu'avant.
"Je quittai tout l'année d'après, maîtres et fiancée, car il ne faut pas que j'oublie de vous signaler, si cela peut vous intéresser, que j'étais près du mariage et pensais au foyer, mais Dieu fait son ouvrage. L'école cléricale de Chatillon-sur-Sèvres, en octobre 1939, me recevait en ses murs. […] Je fis ma septième entière, année pénible pour remettre ma mémoire en état. Le résultat dans l'ensemble fut bon. La sixième allait commencer quand je reçus comme beaucoup d'autres une convocation pour l'Allemagne. Le maquis fut mon refuge pendant quelques mois. Je réussis à me procurer une fausse carte d'identité et pus ainsi reprendre les cours à Noël seulement après bien des démarches." (13/08/47) Il fait ainsi toute sa scolarité à Chatillon, jusqu'en juin 1947. Il a maintenant 27 ans et se trouve à la veille de rentrer au grand séminaire de Poitiers pour commencer la philosophie. Il conclut cette longue lettre par ces mots :"Maintenant, il me reste à faire ma demande d'admission. […] Mon plus grand désir est bien celui d'entrer en votre Société, c'est-à-dire aux Missions Africaines de Lyon, pour devenir prêtre missionnaire et porter la bonne nouvelle aux Noirs d'Afrique." (ibid.)
Son supérieur de Chatillon pense qu'il est mieux qu'il fasse une année supplémentaire de français et de latin avant de faire de la philosophie. Les Missions Africaines l'acceptent volontiers, mais sur ce conseil, les supérieurs lui demandent de faire une année à Martigné-Ferchaud, avant d'aller au noviciat, à Chanly, où il rentre en 1948. Dès lors, il suit le cursus habituel : deux ans de noviciat et quatre ans de grand séminaire à Lyon. A cause de son âge, il obtient d'être ordonné prêtre à la fin de sa troisième année de théologie en 1953. L'année suivante, il est mis à la disposition du supérieur du grand séminaire du 150 pour s'occuper de la ferme du Rozay, une propriété située dans l'Est lyonnais dont une partie des produits servait à la subsistance des séminaristes du 150. Chaque matin, il devait apporter au séminaire le lait de ses vaches et les légumes de son jardin, et il repartait avec le contenu des poubelles pour nourrir ses cochons. Pendant trois ans, il va renouer ainsi avec le travail qu'il faisait à la maison avant son entrée à Chatillon. Il se découvre aussi des talents pour la menuiserie. Enfin, en 1957, il est nommé en Côte d'Ivoire, dans le diocèse de Daloa, avec Mgr Rouanet. En 1968, à la division du diocèse de Daloa, il va se retrouver dans le diocèse de Man avec Mgr Agré.
Il est d'abord nommé vicaire à Man, chargé plus spécialement des travaux et des constructions : le jour de son jubilé d'or, il notera avec fierté qu'il a contribué à construire la cathédrale de Man. Au bout de deux ans, son évêque l'envoie fonder la mission de Siably, dans le pays wobé, où le père Perrochaud le rejoindra en 1961. Ce sont là les belles années de sa vie missionnaire. Tout est à faire, car rien n'est installé, mais cela ne l'effraie pas, car il est habile de ses mains. Mission, chapelles et écoles vont sortir de terre : il dira lui-même qu'il avait construit 63 salles de classe. Il n'était jamais le dernier à manier la truelle, la scie ou le marteau. Pour tous les ouvriers qu'il embauchait, il n'était pas toujours facile de travailler avec lui ; il était exigeant, dur quelquefois dans ses réparties, mais savait reconnaître le travail bien fait.
Bien sûr, au-delà de tout le côté matériel, son souci, ce sera surtout de construire l'Eglise de Dieu dans ce secteur qu'on lui avait confié : visites dans les villages, catéchismes Pour cela, il s'intéresse tout spécialement aux jeunes villageois et villageoises en lançant avec eux la JAC et les familles rurales. Il avait milité lui-même dans la JAC dans sa jeunesse et il en connaissait tous les bienfaits. De plus, sur place, il se fera conseiller et aider par le père Métral, l'aumônier national du mouvement qui viendra régulièrement le visiter. Ce ne fut pas toujours facile, il y eut des échecs parfois, mais de ces groupes sont sortis des catéchistes, des religieuses et aussi des prêtres, ce qui prouve que la terre était bien travaillée…
En 1972, il retrouve la maison de Lyon qu'il avait quittée 15 ans auparavant. Pendant plus de 20 ans, il est chargé de trouver des sources de financement pour la Province. Nommé d'abord au service des foires, le Conseil provincial voudrait qu'il prenne également en charge l'économat de la maison. Ce service ne lui va pas du tout ; très vite, après quelques mois, il se retrouve chargé uniquement des foires. Il doit se rendre dans les villes où se tiennent de grandes foires-expositions : là il monte un stand sma et vend des objets africains, ce que l'on fait maintenant dans les journées d'amitié. Il y a des périodes creuses dans l'année, mais au printemps et à l'automne, c'est un travail fatigant : un jour à droite, un jour à gauche, beaucoup de longs déplacements, monter et démonter le stand, mais c'est une formule rentable.
En 1976, il devient responsable de la procure à Lyon. C'est là un service qui est chargé de trouver des bienfaiteurs pour alimenter les caisses de la Province, travail de bureau, caché, de longues heures passées à faire des enveloppes en épluchant le Bottin, en espérant recevoir quelque chose en retour, des résultats quelquefois décevants ; c'est aussi une correspondance suivie pour garder le contact avec les anciens bienfaiteurs et les "fidéliser".! Après avoir couru la brousse pendant 14 ans, se retrouver entre quatre murs à faire des écritures, quel changement pour un homme qui écrivait lors d'un congé entre deux séjours en mission : "J'ai retrouvé le travail de la terre. Mes meilleurs moments sont consacrés à manier la faux, la houe, à conduire le motoculteur, ce qui me permet de conserver la ligne." (mai 1963) Pour le rapprocher de sa famille, le Conseil provincial lui propose en 1978 de prendre en charge la procure de Rezé. En conscience, il refuse : "Trop engagé pour l'avenir sur Lyon, ma réponse est négative. Ne croyez pas à de la mauvaise volonté de ma part. J'ai réfléchi et pesé le problème pour en tirer la conclusion avec le père Grenot. […] L'intérêt de la maison passe pour moi avant toute autre considération."
Il sera donc renommé deux fois pour quatre ans comme responsable de la procure de Lyon ; il passera cependant la main en 1988, au moment de l'informatisation de la procure (création du SIP, le Service Informatique des Procures) et deviendra aide-procureur pour permettre à son successeur de prendre le temps de s'initier à son nouveau travail. Mais une autre activité le retient à Lyon : "Si je manifeste ce désir de rester au 150, tu en sais la raison. Cette aumônerie au 115 avenue Paul Santy, auprès des vieilles dames, je voudrais m'y consacrer un peu plus et cela demande du temps libre. Les anciens détachés de leur famille, dans leur infirmité et leur expérience de la vie, apportent beaucoup. On s'y attache."(04/08/88) Il précisera d'ailleurs que celles qu'il appelle affectueusement ses grand-mères lui "ont reproché de ne pas aller les voir en dehors des cérémonies".
Nommé à Montferrier en 1995, il va passer dans la maison de retraite les 17 dernières années de sa vie. Aucun fait très marquant n'est à signaler. Tant qu'il le peut, il est fidèle à sa marche quotidienne, mais certainement il regrette de ne pas avoir un coin de terre à cultiver. Un peu de lecture, mais pas trop, car c'était d'abord un homme de la terre. Il aimait suivre les événements du monde à la télévision. On peut quand même signaler deux choses : la première c'est que parfois il aimait parler du passé et alors on ne pouvait plus l'arrêter. Parler de ce qu'il avait fait, de ce qu'il avait été, lui donnait comme l'impression d'y être encore, et cela est curieux de la part d'un homme plutôt discret d'ordinaire et peu enclin à se livrer. L'autre point à signaler à son sujet, c'est l'importance pour lui de sa famille : c'est vrai que quand on a onze frères et sœurs la famille est grande. Pendant ses congés, ils aimaient tous se retrouver pour de grandes parties de palet où il excellait. Pour son jubilé d'or, il a voulu faire quelque chose dans son propre village où, non seulement sa famille, mais de nombreux amis se sont réunis pour une grande fête missionnaire. Quand il a fêté ses 90 ans, en 2010, à la maison de retraite, ils sont venus une bonne trentaine de sa famille pour entourer le frère ou le tonton. Même pour ses obsèques, ils étaient une quinzaine à avoir fait le déplacement jusqu'à la maison des Missions Africaines.
En 2010, quoique diminué à cause de l'âge, il paraissait encore en relativement bonne santé. Ce n'est que vers la fin de 2011 qu'il a commencé à se plaindre de douleurs dans le bas ventre. On a cru tout d'abord qu'il souffrait d'une hernie. Il a donc été hospitalisé au début de l'année 2012, et là, les docteurs ont décelé, non pas une hernie, mais un cancer au pancréas et ils se son vite rendus compte que leurs soins seraient inopérants pour guérir le malade. Il a été ramené et soigné à la maison de retraite où tout a été fait pour qu'il souffre le moins possible. Il nous a quittés le 22 février 2012.
Terminons ces quelques lignes par les derniers mots de l'homélie du père Gabriel Noury, le jour des obsèques : "Homme de la terre, il ne doutait pas que la préparation du terrain, les semailles et la germination étaient nécessaires pour avoir une bonne récolte. Il a su pratiquer la patience aussi bien en Afrique que dans son travail obscur à Lyon. Nous venons d'entendre Jésus dire : 'Vraiment, je vous le dis, personne n'aura quitté, à cause moi et de l'évangile, une maison, des frères, des sœurs, une mère, un père, des enfants, ou une terre, sans qu'il reçoive, en ce temps déjà, le centuple et, dans le monde à venir, la vie éternelle.' Oui, nous croyons qu'aujourd'hui le Seigneur le reçoit en lui disant :'bon et fidèle serviteur, entre dans la joie de ton maître."
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